Le 6 février 2007 au petit matin, le taxi m’amenant de l’aéroport Ezeiza pénètre le quartier de San Telmo dont les rues pavées ont fini de me réveiller quand le chauffeur s’arrête brutalement, un homme vêtu d’un imperméable Burberry traversant la rue sous une pluie battante devant un bus rouge à impériale manifestement londonien !

Pourtant, nous recevons en pleine face un soleil déjà ardent !

Plutôt qu’écouter les plaintes du chauffeur, je descends parler avec les techniciens qui tournaient je ne sais plus quel film policier. Trop tard, déjà j’étais happé par cette ville dont il m’a semblé qu’elle m’était familière alors que j’en ignorais tout.

Le début d’une histoire d’amour avec le barrio San Telmo, ses restaurants et cafés, ses artistes, ses bars, ses antiquaires, sa vie et l’omni présence du tango et du cinéma : pas un séjour sans y croiser un tournage !

J’avais réservé un T2 à l’angle de Bolivar y Humberto Primo (attention pas Primero, car c’est un roi italien), avec patio très sympa sur les photos. De fait assez mignon à l’intérieur mais le patio (sur la photo une personne y somnolait sur un transat, forcément un lendemain de milonga me disais-je) sur lequel donne l’appartement est celui d’un ensemble d’immeubles auquel il permet d’accéder depuis la rue. Classique à Buenos Aires compte tenu de la configuration des pâtés de maisons (manzanas) de 100m de côté (cuadra) environ. Résultat : 200 passages par jour et l’impression d’être le concierge de l’immeuble.

Un autre local donnait sur le patio : un vendeur d’empanadas 7/7 livrant des clients jusqu’à 3h du matin et ses jeunes employés ne trouvaient rien de mieux qu’y finir la nuit à regarder des séries télé (zorro très prisé) en éclatant de rire fenêtre ouverte.

Bon les empanadas offertes au retour de la milonga en contrepartie du fait que j’aurais beaucoup de mal à dormir, 2-3 nuits c’est sympa, après pas suffisant pour oublier les cafards qui courraient le long des murs de la salle de bains et de la cuisine jusqu’à ce qu’enfin, après 3 appels à l’agence de location, le fumigador finisse par régler le problème.

Résolu à revenir à Buenos Aires régulièrement et à ne pas connaître la même désillusion, je me rends dans une agence réputée du quartier pour demander à visiter les meublés en location saisonnière : désillusion car il est impossible de réserver à l’avance pour seulement quelques semaines (depuis j’ai appris que c’est possible mais seulement en direct avec le propriétaire et à condition de venir chaque année).

En ressortant de l’agence, je ne peux m’empêcher de regarder les annonces  en vitrine, vieille manie de voyageur et là je vois les photos d’un appartement sur 3 niveaux, murs et plafond en brique, avec grande terrasse, « calme assuré ! Le prix est à tomber par terre ou plutôt à monter au ciel tant il est inférieur à celui de mon T3 toulousain.

Je retourne voir Fernando (on se tutoie vite et sans manière inutile en Argentine) pour lui annoncer au culot que puisque c’est comme ça je voudrais acheter et que j’ai vu un appartement susceptible de me convenir. Le lendemain nous visitons avec Estela, la voisine de palier qui n’est autre que l’architecte qui a rénové cet immeuble « à la française » (entendez façade type Bd Haussman à Paris ou Rue d’Alsace Lorraine à Toulouse).

A l’époque je n’avais pratiquement pas d’argent disponible mais le prix était si raisonnable et le vendeur brésilien si pressé de vendre pour retourner au pays après son divorce que je finis par faire une offre qui sera rapidement acceptée. 10 jours plus tard, après m’être assuré d’un prêt familial, avoir convaincu un copain de l’acheter avec moi sur la base 50/50 et m’être suffisamment informé auprès d’un notaire et d’un avocat sur les risques encourus, non négligeables mais acceptables à mes yeux, me voilà devant le compromis de vente muni de la procuration de mon pote…